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La brève juridique n°14 - 14/06/2018

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Amis juristes,
Rangez vos tongs et serviettes, ce n’est pas le moment de prendre des vacances. Cet été sera législativement chargé avec pas moins de 3 grands projets qui impactent le droit de la commande publique. Nous profitons donc des premières chaleurs pour revenir sur le contenu de ces différents projets avec une grande question : Mais où en sommes-nous ?

- Projet de loi Elan : l’assemblée nationale a voté les premières mesures (dont l’obligation de regroupement des offices HLM) dans un climat tendu. La suppression de l’obligation de concours reste le principal point d’achoppement entre les députés.

- Projet de loi Agriculture et Alimentation : l’assemblée nationale a voté le projet de loi le 30 mai 2018, nous attendons donc l’examen au Sénat prévu pour le 26 juin 2018. L’objectif de 50 % de produits bio ou locaux dans les cantines pour 2022 a été inscrit dans le texte.

- Projet de code de la commande publique : la grande concertation publique a pris fin le 29 mai 2018, le texte doit être transmis pour avis au Conseil d’Etat dans les prochains jours.

Projet de loi Elan : Le gouvernement touche du bois

Le Gouvernement a décidé de rendre public l'avis du Conseil d'État relatif au projet de loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ELAN).
L’occasion pour nous de revenir sur les différents points du projet impactant la commande publique :
• Concernant le développement de la filière de la construction préfabriquée, les sages rejettent la modification de l’article 32 de l’ordonnance de 2015 relative aux marchés publics. Ils estiment qu’un allotissement prenant en compte les caractéristiques particulières de cette filière est déjà possible conformément à la jurisprudence en vigueur (point 35 à 38).

• Sur la prolongation de la possibilité de recours à la procédure de conception réalisation pour les OPH, le Conseil d’Etat indique que cette dernière ne soulève pas de difficultés d’ordre constitutionnel ou conventionnel (point 39).

• Concernant la suppression de l’obligation de concours pour les organismes HLM, le Conseil d’Etat estime justifiée l’exemption compte tenu de l’impact de la loi MOP sur les coûts et délais de réalisation des projets HLM (point 56).

• Et enfin, au niveau du regroupement obligatoire d’organismes de logement social, le Conseil relève que le regroupement a, certes, des incidences sur le droit de propriété, mais il permet une meilleure allocation des ressources au service des missions d’intérêt général de ces organismes. Dans ces conditions, l’obligation prévue par le projet répond à un objectif d’intérêt général (point 53).
Le gouvernement, qui souhaite aller vite sur ce sujet doit se frotter les mains. Après l’avis obligatoire du Conseil d’Etat, le projet peut enfin passer en Conseil des ministres pour prendre ensuite le chemin du Parlement ou une avalanche d’amendements est à attendre. Une chose est sûre, le projet de loi Elan n’a pas fini de faire couler beaucoup d’encre.

CE, Avis sur le projet de loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, séance du 29 mars 2018, n° 394435

Projet de loi Agriculture et Alimentation : Imposer le bio et/ou le local dans les marchés publics d'alimentation : peut-on y croire ?

Le député du Rhône a récemment interpellé le Gouvernement sur sa volonté de prendre en compte l'agriculture biologique et l'approvisionnement en circuit court comme critères d'attribution des marchés publics.

Il s'interroge sur la compatibilité de ce mécanisme au regard des principes fondamentaux de la commande publique, notamment l'interdiction des discriminations géographiques.

Le ministre de l'agriculture et de l'alimentation confirme que l'objectif fixé par le Gouvernement d'atteindre 50% de produits "bio" ou locaux sera bien atteint d'ici l'année 2022.

Juridiquement, le ministre précise qu'un projet de loi allant dans ce sens a été déposé à l'Assemblée le 1er février 2018, lequel est conforme au droit de la commande publique européen.

Le Gouvernement cite notamment l'article 11 du projet de loi, lequel prévoit l'obligation pour les personnes publiques d'inclure dans la composition des repas "une part significative" de produits acquis en "prenant en compte le coût du cycle de vie du produit, ou issus de l'agriculture biologique".

Que faut-il donc en penser?

S'agissant de la compatibilité avec le droit européen de la commande publique, cela ne fait pas de doute. Et pour cause…le droit positif prévoit déjà expressément la possibilité de prendre en compte le critère unique du coût dans l'attribution des marchés.

Par ailleurs, aucune disposition législative ou réglementaire n'interdit à un acheteur d'exiger une qualité particulière (tel un label) sur un produit qu'il achète.

Autrement dit, si ce n'est l'insertion d'une disposition prévoyant la part "significative" (fixée à 50 % pour 2022), aucun nouveau mécanisme ne permet de prendre en compte une éventuelle "préférence locale".

De plus, si la réponse ministérielle fait référence à la "boîte à outil" "LOCALIM" pour permettre aux acheteurs de développer "les achats en produits locaux de qualité", la lecture de ce document n'est, il faut l'avouer, guère plus éclairante…

Certes, des fiches techniques sont intitulées "favoriser l'approvisionnement local et de qualité", mais aucun outil novateur n'est disponible dans cette boîte afin de permettre aux acheteurs de favoriser un approvisionnement local.

Au contraire, mais c'est heureux, la fiche méthodologie "s'approprier les concepts généraux", rappelle le fait que les spécifications techniques d'un marché public ne peuvent "faire mention d'une provenance ou origine déterminée", et l'interdiction de "préciser le lieu d'information du fournisseur dans le cahier des charges".

Il en résulte donc que les acheteurs auront, à l'horizon 2022, de nouvelles obligations en matière de qualité des produits servis en restauration collective, mais resterons astreints aux mêmes obligations s'agissant de non-discrimination géographique dans l'attribution du marché.
Il est donc à souhaiter que ce bavardage législatif ne sera pas source de brouhaha juridique, voire de dispute contentieuse…

QE n° 5151, réponse publiée au JOAN du 3 avril 2018, p. 2793

Projet de code de la commande publique : Consultation express

La date butoir du 9 décembre 2018 imposée par la loi « Sapin 2 » pour élaborer ce fameux Code de la commande publique se rapprochant dangereusement, Bercy passe la seconde et dévoile son projet de code en date du 18 avril 2018.
Ce nouveau code est scindé entre partie législative et règlementaire pour un peu plus de 400 pages de pur plaisir. Au grand dam de nombreux praticiens, le nommage des articles reprend les usages des dernières grandes codifications (articles Lxxxx-1 et Rxxxx-1).
L’architecture du code de la commande publique se découpe classiquement en trois parties :
• La première partie est consacrée aux définitions et au champ d’application du code de la commande publique (contrats concernés, acteurs de la commande publique).

• La deuxième partie est consacrée à la préparation, la passation et l’exécution des marchés publics. A noter ici que sont reprises non seulement les règles des ordonnances et décrets « marchés publics », mais également les dispositions relatives à la maitrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée (Loi MOP), à la sous-traitance et aux délais de paiement.

• La troisième partie est quant à elle consacrée exclusivement aux contrats de concession.
Précision importante apportée par la DAJ, la codification est effectuée à droit constant et n’embarque aucune modification des règles actuellement applicables.

Dans le même temps, Bercy a lancé une « grande » consultation pour recueillir les observations des différents acteurs de la commande publique.

Laure Bédier, directrice de la DAJ ne s’en cache pas, l'idée est de transmettre le texte au Conseil d'Etat avant l'été afin de pouvoir publier le code dans le délai imparti.

Le calendrier de la consultation atteste d’une volonté évidente de concertation, puisque les acheteurs et les opérateurs économiques ne devront pas chômer et profiter des beaux jours et des ponts du mois de mai pour décortiquer minutieusement ce nouveau code. Ils n’ont eu en effet que du 23 avril au 13 mai pour envoyer leurs observations relatives au projet, le reste du mois de mai étant consacré aux dispositions relatives à l’outre-mer.

A noter que la DAJ a mis à disposition un courriel pour faire parvenir les remarques : concertation2.daj@finances.gouv.fr

Projet de Code de la commande publique du 18 avril 2018


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